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Actualité
12/2/23

Les clauses d’exclusivité figurant dans les contrats de distribution doivent avoir la capacité de produire des effets d’éviction pour constituer un abus de position dominante

Dans un arrêt du 19 janvier 20231, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a considéré qu’un fournisseur occupant une position dominante sur un marché et imposant à ses distributeurs d'insérer des clauses d’exclusivité dans leurs contrats conclus avec les exploitants des points de vente peut être sanctionné sur le fondement de l’article 102 TFUE s’il est démontré que ces clauses ont la capacité d’évincer des concurrents aussi efficaces, la charge de la preuve incombant à l’autorité nationale de concurrence qui a l’obligation de prendre en compte les analyses économiques produites par le fournisseur afin de démontrer l’absence d’effet anticoncurrentiel, même potentiel.

 

En l’espèce, la société Unilever Italia Mkt. Operations Srl (Unilever), qui fabrique notamment des glaces consommées hors du domicile, dispose d’un réseau de 150 distributeurs qui approvisionnent des points de vente à travers toute l’Italie. A la suite d’une plainte d’un concurrent, l’autorité italienne de concurrence (AGCM) a mené une enquête puis a rendu une décision le 31 octobre 2017 considérant que la société Unilever avait commis un abus de position dominante et lui infligeait une amende s’élevant à 60 668 580 euros. La recours d’Unilever contre cette décision ayant été rejeté par la juridiction de première instance, elle a saisi en appel le Consiglio di Stato (équivalent du Conseil d’Etat français).

 

Le Conseil d’État italien a posé à la CJUE les questions préjudicielles suivantes :

  1. Quels sont les critères pertinents pour déterminer si la coordination contractuelle entre des opérateurs économiques formellement autonomes et indépendants donne lieu à une unité économique au sens de l’article 102 TFUE ?
  2. Faut-il interpréter l’article 102 TFUE comme faisant obligation à l’AGCM d’étudier les analyses économiques produites par une partie pour démentir les effets de la pratique anticoncurrentielle sur les concurrents et existe-t-il une obligation juridique pour cette autorité de concurrence d’appliquer le critère du concurrent le plus efficace pour caractériser l’abus de position dominante ?

 

S’agissant de la première question, la CJUE indique que les agissements adoptés par les distributeurs faisant partie d’un réseau de distribution peuvent être imputés au fournisseur jouissant d’une position dominante s’il est établi que ces agissements font partie d’une politique décidée unilatéralement par le fournisseur et mise en œuvre par l’intermédiaire desdits distributeurs. En l’espèce, la société Unilever imposait à ses distributeurs de faire signer aux exploitants de points de vente, sans pouvoir les amender, des contrats-types contenant des clauses d’exclusivité au bénéfice de ses produits.  

 

S’agissant de la seconde question, la CJUE rappelle, en se référant à son arrêt United Brands et Continentaal c/ Commission2 du 14 février 1978, qu’une autorité nationale de concurrence doit nécessairement apprécier la capacité des clauses litigieuses à restreindre la concurrence au vu de preuves factuelles concrètes. Dans le cas où l’entreprise poursuivie présente des preuves telles que des analyses économiques, l’autorité de la concurrence est tenue d’en tenir compte ou, dans le cas contraire, de justifier des raisons pour lesquelles elle les écarte. Le simple fait que ces clauses illicites puissent nuire à la concurrence ne suffit pas à attester de leur caractère anticoncurrentiel. Pour ce qui est du critère du concurrent le plus efficace, les autorités de concurrence ne sont pas dans l’obligation d’y avoir recours pour constater le caractère abusif d’une pratique, sauf dans le cas où l’une des parties l’invoquerait.

Philippe BONNET / Hadrien JOLIVET / Stanislas CREMET
Image par Steve Buissinne de Pixabay
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