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Actualité
21/2/24

Le Conseil d’Etat ordonne à l’Arcom de réexaminer le respect par CNews de ses obligations en matière de pluralisme et d’indépendance de l’information

Dans une décision du 13 février 2024, le Conseil d’État a rendu une décision remarquée et critiquée, relative au pluralisme et à l’indépendance de l’information dans les médias audiovisuels.

Par cette décision, le Conseil d’État fournit une interprétation renouvelée de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et renforce la capacité de contrôle par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) des obligations des médias en matière d’honnêteté, de pluralisme et d’indépendance de l’information, dans le respect de leur liberté éditoriale1

Estimant que CNews ne respectait pas ces exigences, l’association Reporters sans frontières (« RSF ») avait demandé à l’Arcom, par courrier du 30 novembre 2021, de mettre en demeure cette chaîne de les respecter.

Face au refus de l’Arcom de prononcer une telle mise en demeure, RSF a saisi le Conseil d’Etat en avril 2022.

Le pluralisme de l’information ne se limite pas au temps de parole des personnalités politiques

Désormais, pour apprécier le respect par une chaîne de télévision, quelle qu’elle soit, du pluralisme de l’information, des courants de pensées et d’opinions représentés, l’Arcom devra prendre en compte la diversité des courants de pensée et d’opinions représentés par l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités, et pas uniquement le temps d’intervention des personnalités politiques.

L’indépendance de l’information s’apprécie au regard de l’ensemble des conditions de fonctionnement et des caractéristiques de programme d’une chaîne de télévision

Le Conseil d’Etat considère également que l’Arcom doit s’assurer de l’indépendance de l’information au sein de la chaîne « en tenant compte de l’ensemble de ses conditions de fonctionnement et des caractéristiques de sa programmation, et pas seulement à partir de la séquence d’un extrait d’un programme particulier ».

Le Conseil d’Etat a, en revanche, rejeté les autres griefs formés par RSF à l’encontre de la chaîne CNews.

La décision écarte l’argumentation de RSF et considère que la place des émissions de débat dans la programmation de CNews ne remet pas en cause son format de service consacré à l’information.

RSF reprochait aussi à CNews de méconnaître ses obligations en la matière, ayant diffusé deux séquences relatives à une émission offrant une présentation déséquilibrée d’une tribune controversée signée par des militaires et une autre émission dans laquelle un sondage avait été présenté de manière trompeuse. Toutefois, le Conseil d’Etat a relevé que l’Arcom avait déjà mis en garde la chaîne contre la répétition de tels manquements.

En conséquence, le Conseil d’Etat enjoint à l’Arcom de « réexaminer, dans un délai de six mois, le respect par la chaîne CNews de ses obligations en matière de pluralisme et d’indépendance de l’information », en tenant compte des précisions apportées sur la portée des obligations prévues par la loi de 1986.

La décision du 13 février 2024 a fait l’objet de vives réactions, certains s’interrogeant notamment sur les modalités concrètes de mise en œuvre des pouvoirs de contrôle de l’Arcom à la suite de cette décision et sur la conciliation de ces exigences renouvelées avec le respect de la liberté éditoriale des chaînes de télévision et de radio2.

On rappellera seulement que la présente décision s’inscrit dans une jurisprudence antérieure constante du Conseil d’Etat selon laquelle le pluralisme s’impose, y compris par exemple dans les débats ou les programmes de divertissement qui concourent au traitement de l’information3.

L’Arcom a fait savoir qu’elle « réexaminera le recours de l’association Reporters sans frontières, conformément aux termes de la décision» du Conseil d’Etat.

Aurélie BRÉGOU / Pauline FOURNIÉ

1 Articles 3-1 et 13 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

2 Dans sa décision du 13 février 2024, le Conseil d’Etat rappelle que : « Il résulte des dispositions de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 et de celles des articles 3-1 et 13 de la même loi, citées au point 1, que l'Arcom a pour mission de garantir le respect de l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion dans les programmes audiovisuels, notamment dans les programmes consacrés à l'information. Il lui appartient à cet effet d'apprécier le respect par les éditeurs de service de cette exigence, dans l'exercice de leur liberté éditoriale, en prenant en compte, dans l'ensemble de leur programmation, la diversité des courants de pensée et d'opinion exprimés par l'ensemble des participants aux programmes diffusés

3 Conseil d’Etat, 29 novembre 2022, n°452762 : l’éditeur d’un service de communication audiovisuelle, en l’espèce de l’émission « Les Grandes gueules » diffusée sur RMC et Diversité TV, peut parfaitement disposer de sa « ligne éditoriale qui peut le conduire à faire intervenir à l’antenne des personnalités développant les thèses les plus controversées, dont les propos ne sauraient être regardés comme relevant par eux même de la présentation et du traitement de l’information par l’éditeur du service. » Mais cette liberté a une limite. « L’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes qui y concourent » imposent à cet éditeur « y compris dans les programmes qui, sans avoir pour seul objet la présentation de l’information, concourent à son traitement, même sous l’angle de la polémique, de n’aborder les questions prêtant à controverse qu’en veillant à une distinction entre la présentation des faits et leur commentaire et à l’expression de points de vue différents ».

Image par Canva
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